
Arrêtez de vous excuser !
Dans nos expériences de visite en tant que visiteuses, nous constatons souvent que les guides s’excusent. De diverses manières, pour diverses raisons, mais beaucoup commencent par s’excuser, et franchement, c’est très dommage.
Très récemment, on a suivi une visite guidée en équipe. Alors certes, nous sommes une équipe de guides et c’est souvent plus difficile de faire une visite devant ses pairs. Mais le guide a commencé par nous dire. “Ah, vous êtes guides il parait ?! Bon, ça fait pas longtemps que je fais ce métier hein, j’espère que ça ira”. On a trouvé ça trop dommage que notre visite commence par ça. Ce genre de commentaires nous met malgré nous dans une attente négative. D’autant que la visite qui a suivi était super, le guide en question avait une personnalité très affirmée, un texte et un timing tout à fait maitrisés.
Alors pourquoi s’excuser d’avance ? Pourquoi commencer par ça ? Quel est l’objectif ? Pour nous, l’impact a été de penser : « bon bah dommage, ça va être moyen ». Alors certes, on a pu constater qu’en fait, c’était très bien et on était rassurés, mais ça n’invite pas à se mettre dans de bonnes dispositions.
Quand on accueille de nouvelles stagiaires, on leur interdit explicitement de dire qu’elles font leur première visite en début de visite, ou qu’elles sont stagiaires, parce que ça met le public dans une attente étrange.
Quand on fait une visite pour la première fois, ça nous semble une très mauvaise idée de le dire avant de commencer. On peut éventuellement le dire en fin de visite “C’était ma première !” Et les visiteur·euse·s seront content·es d’avoir assisté à une première et féliciteront leur guide parce qu’ils ne s’en seront pas du tout rendu compte.
Les 1000 autres manières de s’excuser.
Et dans des visites menées depuis longtemps, les guides (même très expérimenté·es) regorgent de créativité pour s’excuser.
“Je ne suis pas très douée en chiffres”.
NON. Si on ne se souvient plus d’un chiffre, on ne le dit pas et c’est tout. Vos visiteur·euse·s sont souvent déjà impressionnés de tout ce que vous avez retenu sur le sujet !
“Je suis là pour la saison, je ne connais pas par cœur toute la région”.
NON. Si on vous pose une question très spécifique, donnez votre réalité. Mais ce n’est pas la peine d’anticiper cela et de laisser le public imaginer que vous ne saurez pas les renseigner. Dans 90% des cas, vous aurez toutes les réponses aux questions, personne ne le saura et ce sera très bien comme ça parce que ça ne créera pas de déception.
“Si vous avez des questions, n’hésitez pas à m’interrompre”.
Mais NON voyons. On n’interrompt pas son guide, c’est très malpoli ! Si vous pensez que votre parole peut être interrompue n’importe quand, quelle valeur donnez-vous à votre parole ? Disons plutôt : “S’il y a des questions que vous vous posez et auxquelles je n’aurai pas répondu en fin de visite / arrêt, je prévois un temps pour ça”.
À bas le syndrome de l’impostrice.
Il est très facile (et très courant) dans nos métiers de ressentir ce syndrome de l’imposteur·ice parce qu’on est dans un métier de transmission qui nous place comme “sachant” dans les représentations communes, un métier dans lequel l’on s’expose beaucoup, où l’on parle de nombreux sujets dont et on ne peut de toute évidence pas être vraiment pointu·es sur TOUS ces sujets.
Mais il nous semble vraiment préférable de nous redire en permanence que nous sommes légitimes plutôt que de chercher à nous justifier sur les points sur lesquels on se sent moins serein·es. Ce sera toujours mieux et pour plusieurs raisons. Côté public, ça évitera de provoquer par anticipation quelque chose de négatif (“ça risque de ne pas être super” ; “si elle est mauvaise en chiffre, je vais aller vérifier les chiffres donnés”…) Côté guide, ça nous empêche d’assumer notre rôle. Ça nous met d’emblée dans une posture d’incompétent·e alors que nous sommes légitimes et compétent·es.
Si l’on veut que notre métier et nos compétences soient reconnues à leur juste valeur, arrêtons de nous excuser.




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